par Jean-Marc Introvigne
Une impulsion stimulante a été lancée aux artistes de l’association K-droz pour explorer le thème mystérieux « Au-delà du noir ».
Noir terrifiant des ténèbres et du néant dans la Genèse, noir de l’Hadès grec, la symbolique et les connotations attribuées à la couleur noire ont varié à travers l’histoire de la civilisation occidentale.
L’essor de l’imprimerie a inscrit l’illustration en noir dans nos pupilles. Du ciel nocturne qui a fasciné l’humanité, la physique et la cosmologie parlent matière noire, trous noirs, énergie noire. Le noir de nos objets contemporains est marqueur de raffinement, d’élégance et de technique. La peinture a souvent joué de l’ombre et de la lumière, faisant émerger la figuration lumineuse d’un fond charbonneux inconnu. Elle s’est crue morte dans sa fonction descriptive, affichant le noir provoquant d’un Malevitch, s’invitant à expérimenter l’espace du Color Field, des Ultimates Paintings ou du cinétique des années 50.
Pierre Soulages a exploré ce qu’il appelle « l’outrenoir » en travaillant les textures de noir sur la toile, appelant la sensation à surgir des fragments au-delà du noir. Effacer l’image, noircir la toile, laisser aux textures seules quelques indices pour le spectateur invité à un cheminement intérieur, peut-être spirituel.
Le noir nait du calciné et entretient avec le rouge feu un lien étroit. Les techniques évoluent, de la suie au Vantablack d’aujourd’hui, cette matière brevetée par l’artiste Anish Kapoor ne restitue que 0, 04% de la lumière. Alors comment les artistes d’aujourd’hui, voient-ils leur « Au-delà du noir ? »
Claudine Fournier & Jean Marc Introvigne
Commissaires de l’exposition.